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Tribune par Grégoire Vigroux, Vice President Marketing pour l’Europe de TELUS International

Telus International
Grégoire Vigroux

Millennials et argent : le grand jeu

Les millenials alimentent bon nombre de fantasmes. Particulièrement volatile, la génération Y bouscule les certitudes des acteurs politiques et économiques. Cependant, beaucoup se demandent comment appréhender leurs choix de produits et de services, mais aussi de valeurs ? On sait pourtant sur quel terrain les aborder : ils tapent en moyenne 300 à 400 fois par jour sur leur smartphone et c’est sous les bons auspices du digital que cette génération se réalise et affirme son indépendance. Fascinés par des success-stories en provenance de compagnies non-financières, ils possèdent un degré d’exigence inédit tandis que le spectre de leurs attentes est très vaste. Petite mise au point sur celles-ci avec, en filigrane, leur rapport à l’argent.

Le spleen des banques

L’assimilation effrénée des outils numériques par les millennials est à l’image de leur rapport au monde ainsi qu’à la consommation. La liberté d’action décuplée dont ils disposent par rapport à leurs aïeux en font des consommateurs plus avertis mais surtout plus redoutables pour ceux qui doivent les ravir. Si l’acte d’achat est banalisé au simple clic, il s’est considérablement élargi puisqu’il se fait désormais à la vue de tous. Mais au-delà du fait de partager ses expériences d’utilisation de produits et services, le digital native a une perception totalement différente de l’argent en lui-même (en voie de dématérialisation).

En premier lieu, ceux-ci représentent la première génération pour laquelle il est plus évident de parvenir à ses fins en limitant les interactions face-à-face. Non seulement ils changent les habitudes des banques en plébiscitant la technologie mais ils sont aussi en retard sur la planification de leur avenir financier par rapport aux générations précédentes. Comble de la mutinerie : leur méfiance avérée à l’égard de la finance et de ses acteurs.

Paradoxalement, ils raffolent d’informations financières et consultent leurs comptes en permanence. En outre, grâce à la technologie il s’estiment plus que jamais capables de gérer leur pécule au centime près. Problème, la plupart ne se sentent pas bien aiguillés : 59% d’entre eux disent n’avoir jamais vu de produits financiers qui les ciblent, d’après une étude BNY Mellon.

« Catch me if you can »

La défiance envers les acteurs traditionnels de la finance n’est pas qu’imputable à la crise de 2008 qui n’a fait que cristalliser un mal plus profond. Les banques se montrent toujours aussi incapables de communiquer intelligemment avec la génération Y. Par manque de souplesse et de services modernes mais aussi à cause d’un manque de justesse dans le message marketing (quand celui-ci ne souffre pas de problèmes d’adaptation aux contingences techniques actuelles du multi-support).

Il faut convaincre qu’un avenir financier plus sûr peut aussi rimer avec flexibilité. Ainsi qu’être tendance : les millennials vous reprocheront tout sauf d’être imaginatifs ou d’avoir le sens de la dérision et de l’humour. En outre, à l’ère du « do ityourself », il est judicieux d’encadrer la découverte de vos produits en orientant les jeunes dans la gestion de leur finance et dans la manière de se créer un patrimoine. Cela passe par la communication directe mais aussi par réaliser du Content Marketing à partir de contenus d’experts : vidéos et tutoriels expliquant comment se constituer un pécule ou comment rembourser ses dettes, notamment.

Objectif valeurs

L’impact social de ce que consomme les millennials est une variable essentielle. Une vague sur laquelle surfe CNote, la fintech gagnante du concours de start-ups SXSW, qui a eu lieu à Austin, aux Etats-Unis. L’épargne des clients de CNote est destinée à des projets sociaux. Car si les millennials sont méfiants à l’égard des banques et du politique, ils croient à l’inverse en l’entreprise pour changer le monde. 79% d’entre eux regrettent d’ailleurs que ce ne soit pas plus simple de savoir quelles entreprises font le bien autour d’elles, d’après un rapport de 2014 de MSL Group. Ils attendent d’une entreprise que rentabilité financière rime avec résolution de problèmes de société grâce à ce qu’elle produit, à ses contributions positives et aux valeurs qu’elle incarne.

Mais attention, les jeunes sont aussi avisés en matière de dépistage du greenwashing et d’actions de communication artificielles, certaines ayant parfois des effets pervers pour le public visé. Et si une action n’est que le fruit de contraintes réglementaires imposées, cela se voit et se sait. En bref, les millenials exigent que la gouvernance de l’entreprise soit irriguée par des principes sains et veulent un droit de regard sur cela.

Conclusion

L’entreprise de demain a la lourde responsabilité d’investir un champ politique obnubilé par l’économie. Les millennials plébiscitent ce changement, façonnant les acteurs privés dont ils observent chaque faits et gestes. Offrir de bonnes conditions de travail, produire proprement et être éthiquement irréprochable sont des étendards pour cette génération. Tout comme leur liberté qu’ils chérissent, d’où leur réticence à s’endetter. Les décisions financières auxquelles vont faire face prochainement ceux qui représenteront 75% des actifs en 2030 risquent d’être un sacré indicateur de l’évolution du secteur et de nos sociétés. C’est en tout cas une énigme pour bon nombre de banques.
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